Figure de la critique de cinéma, Jean Collet est mort mercredi 11 novembre à l’âge de 88 ans. Né en 1932, il était un ancien élève de l’Ecole technique de photographie et de cinéma de la rue de Vaugirard, créée en 1926 sous l’impulsion de Louis Lumière et de Léon Gaumont, aujourd’hui l’Ecole nationale supérieure Louis-Lumière.
Après avoir travaillé au Centre audiovisuel de l’éducation nationale, il devient en 1953 le premier cameraman de la « Télévision scolaire ». En 1954, c’est d’abord sa rencontre avec Henri Agel (cinéphile passionné, directeur de la classe préparatoire à l’Institut des hautes études cinématographiques, l’actuelle Fémis), mais aussi la lecture des articles d’André Bazin, de Roger Leenhardt et surtout de François Truffaut qui l’ont porté vers la critique de cinéma, une critique « qui ne cherche pas à écraser le lecteur ou à dire en termes sibyllins des choses limpides ». De 1955 à 1971, Jean Collet écrit à Radio-Cinéma-Télévision (qui devient bientôt Télérama). En 1961, il entre aux Cahiers du cinéma, où il restera jusqu’en 1968.
Jean Collet a écrit, entre autres, le premier livre de référence sur Jean-Luc Godard
Jean Collet a connu Jacques Demy à l’Ecole de la rue de Vaugirard, avant de rencontrer Jean-Luc Godard sur lequel il a écrit le premier livre de référence, qui fit d’ailleurs le tour du monde (Seghers, 1963, réédité en 1974). Mais c’est la rencontre avec François Truffaut sur le tournage de La Peau douce (1964) qui est décisive. Jean Collet écrit alors le premier ouvrage sur le cinéaste des Quatre Cents Coups (Le Cinéma de Truffaut, P. Lherminier, 1977, réédité en 1985). Cette admiration réciproque des deux hommes, cette volonté commune de ne pas séparer « cinéma d’auteur » et « cinéma populaire » font naître une profonde amitié, dont témoigne notamment la Correspondance de Truffaut (Hatier, 1988).
Les autres rencontres marquantes de Jean Collet sont celles avec Robert Bresson, Roberto Rossellini, Federico Fellini, Alain Resnais, Eric Rohmer, Ingmar Bergman et Claude Chabrol (rencontres dont Jean Collet tire un ouvrage en 1972 : Le Cinéma en question : Rozier, Chabrol, Rivette, Truffaut, Demy, Rohmer, éditions du Cerf).
Passeur à nul autre pareil
En 1970, Jean Collet introduit l’enseignement du cinéma dans plusieurs universités (Paris-VII René Descartes, Caen, Dijon) tout en tenant parallèlement, après Henri Agel, sur une durée d’une ampleur exceptionnelle (de 1965 à 2015), la chronique mensuelle de cinéma de la revue jésuite Etudes. Dans les années 1980, il participe à l’ouvrage La Nouvelle Vague, 25 ans après (éditions du Cerf, 1983), avant d’appréhender La Création selon Fellini (José Corti, 1990), puis l’œuvre immense de John Ford (John Ford, la violence et la loi, Michalon, 2003). Professeur au Centre Sèvres à Paris, animateur infatigable de ciné-clubs, admirateur de Clint Eastwood et de Pedro Almodovar, de Pascale Ferran et d’Agnès Jaoui, Jean Collet a publié en 2014 une passionnante Petite Théologie du cinéma (éditions du Cerf).
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