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La mort du poète Jude Stéfan

Il est l’auteur d’une soixantaine d’ouvrages, et son œuvre est l’une des plus marquantes et singulières de la seconde moitié du XXe siècle. Penseur et technicien du vers, il est mort, le 11 novembre, à l’âge de 90 ans.

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Publié le 16 novembre 2020 à 13h49, modifié le 17 novembre 2020 à 16h04

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Jude Stéfan, en 1999.

« Ayant vu le jour/il mourut, sa mort survint, le surprit,/ il fut enterré, il décéda,/ succomba,/ il disparut… », écrivait Jude Stéfan au début d’un beau et grinçant poème, publié en 1984 dans Laures (Gallimard). Et, de fait, il est mort, à Orbec, dans le Calvados, mercredi 11 novembre. La ville normande ne l’ignorait pas, qui lui avait consacré une exposition, en 2010. Il était né non loin de là, quatre-vingt-dix ans plus tôt, à Pont-Audemer, dans l’Eure, le 1er juillet 1930. Le grincement, qui est l’un des traits saillants de l’œuvre de Stéfan, n’est pas là pour nier la profondeur ni le mystère du poème, qui rejoint, par des chemins il est vrai sinueux, celui de l’existence : « Nul ne saura qu’il fut/ce qu’il fit : Poème/momie de l’énigme. » (Stances, Le Temps qu’il fait, 1991).

De son vrai nom Jacques Dufour, il avait choisi son nom de plume en associant Jude l’obscur, de Thomas Hardy, et, en le slavisant, Stephen le héros, de James Joyce. Après deux années de primaire chez les jésuites, il termine ses études classiques à Caen. Il pratique le football, le ping-pong, le sport, dira-t-il, le soigne de l’ennui. Il voyage un peu, mais sans beaucoup s’éloigner, en Italie, en Angleterre, en Algérie.

Au début des années 1950, il tombe malade, une polyarthrite, qui l’immobilise durant une année. Il étudie un peu le droit, lit les moralistes français, Husserl, Nietzsche… A partir de 1959, il enseignera les lettres classiques au lycée de Bernay, sans interruption jusqu’en 1995. Ces données biographiques, il les fournissait lui-même volontiers, sous cette forme squelettique, et surtout sans s’attarder.

Un technicien du vers

Jude Stéfan est l’auteur d’une soixantaine d’ouvrages, poèmes, nouvelles et écrits divers, fragments, notes ou notules critiques et sarcastiques – qu’il ne faut pas négliger. « J’ai écrit par désespoir, même si cet aveu, après Blanchot et Bataille, n’a plus le même poids de ferveur et fera sourire. J’écris aussi, faute de mieux, pour sortir de moi-même avec violence. C’est une forme de salut inscrite dans l’instant, sans souci de l’avenir », expliquait Jude Stéfan à Raphaël Sorin, qui l’interrogeait pour Le Monde, en juin 1983.

C’est en 1967 qu’il publie son premier livre de poèmes, Cyprès, chez Gallimard dans la collection « Le Chemin ». Avant cela, il y avait eu l’histoire, peut-être légendée, d’un manuscrit perdu, envoyé à Georges Lambrichs, directeur de cette collection, sur le conseil de Maurice Blanchot, et qui aurait été égaré dans un taxi par Jean Paulhan. Invérifiable.

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