(JUR) Vademecum de l’adoption d’un enfant étranger par un couple français

Un couple demeurant en France demande l’adoption simple d’une enfant née et demeurant en Haïti et le procureur général près la Cour de cassation forme, sur le fondement de l’article 17 de la loi du 3 juillet 1967, un pourvoi contre le jugement qui a accueilli cette demande.

Un TGI non spécialement désigné en application des articles L. 211-1 et D. 211-10-1 du Code de l’organisation judiciaire pour connaître des actions aux fins d’adoption, lorsque l’enfant résidant habituellement à l’étranger a été, est ou doit être déplacé vers la France, s’il peut toujours se déclarer d’office incompétent en application de l’article 76 du Code de procédure civile, n’y est jamais tenu.

Dès lors que le jugement a été rendu sur avis conforme du ministère public, qui n’a pas soulevé l’incompétence du TGI de Pointe-à-Pitre au profit de celui de Basse-Terre, juridiction spécialement désignée pour connaître des adoptions internationales dans le ressort de la cour d’appel de cette même ville, le procureur général près la Cour de cassation n’est pas fondé à lui reprocher de n’avoir pas relevé d’office son incompétence.

Mais aux termes de l’article 2.1 de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, entrée en vigueur en France le 1er octobre 1998 et en Haïti le 1er avril 2014, la Convention s’applique lorsqu’un enfant résidant habituellement dans un État contractant (« l’État d’origine ») a été, est ou doit être déplacé vers un autre État contractant (« l’État d’accueil »), soit après son adoption dans l’État d’origine par des époux ou une personne résidant habituellement dans l’État d’accueil, soit en vue d’une telle adoption dans l’État d’accueil ou dans l’État d’origine.

L’article 4 de cette Convention dispose que les adoptions visées par la Convention ne peuvent avoir lieu que si les autorités compétentes de l’État d’origine :

a) ont établi que l’enfant est adoptable ;
b) ont constaté, après avoir dûment examiné les possibilités de placement de l’enfant dans son État d’origine, qu’une adoption internationale répond à l’intérêt supérieur de l’enfant ;
c) se sont assurées que les personnes, institutions et autorités dont le consentement est requis pour l’adoption ont été entourées des conseils nécessaires et dûment informées sur les conséquences de leur consentement, en particulier sur le maintien ou la rupture, en raison d’une adoption, des liens de droit entre l’enfant et sa famille d’origine, que celles-ci ont donné librement leur consentement dans les formes légales requises, et que ce consentement a été donné ou constaté par écrit, que les consentements n’ont pas été obtenus moyennant paiement ou contrepartie d’aucune sorte et qu’ils n’ont pas été retirés, et que le consentement de la mère, s’il est requis, n’a été donné qu’après la naissance de l’enfant ;

d) que ces mêmes autorités compétentes se sont assurées, eu égard à l’âge et à la maturité de l’enfant, que celui-ci a été entouré de conseils et dûment informé sur les conséquences de l’adoption et de son consentement à l’adoption, si celui-ci est requis, que les souhaits et avis de l’enfant ont été pris en considération, que le consentement de l’enfant à l’adoption, lorsqu’il est requis, a été donné librement, dans les formes légales requises, et que son consentement a été donné ou constaté par écrit et que ce consentement n’a pas été obtenu moyennant paiement ou contrepartie d’aucune sorte.

L’article 5 de la Convention dispose que ces adoptions ne peuvent avoir lieu que si les autorités compétentes de l’État d’accueil ont constaté que les futurs parents adoptifs sont qualifiés et aptes à adopter, qu’ils ont été entourés des conseils nécessaires que ces autorités ont constaté que l’enfant est ou sera autorisé à entrer et à séjourner de façon permanente dans cet État.

Selon l’article 6.1 de la Convention, chaque État contractant désigne une Autorité centrale chargée de satisfaire aux obligations qui lui sont imposées par la Convention.

Enfin, selon l’article 14 de la Convention, les personnes résidant habituellement dans un État contractant, qui désirent adopter un enfant dont la résidence habituelle est située dans un autre État contractant, doivent s’adresser à l’Autorité centrale de l’État de leur résidence habituelle.

Viole ces textes le tribunal qui, pour prononcer l’adoption simple de l’enfant, constate que les conditions légales de l’adoption simple sont remplies et que celle-ci est conforme à l’intérêt de l’enfant, sans vérifier d’office si la procédure et les mécanismes de coopération instaurés par la Convention de La Haye ont été mis en œuvre.