QUESTION, RÉPONSE

Ai-je le droit de mener deux procédures disciplinaires différentes pour des faits fautifs commis au même moment par un salarié ?

Publié le 24/11/2022 à 06:55, modifié le 04/03/2024 à 09:37 dans Sanction et discipline.

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Pouvoir disciplinaire : principe

En vertu de votre pouvoir disciplinaire, vous êtes en droit de sanctionner les agissements fautifs d’un salarié.

Pour cela, vous disposez d’un délai de 2 mois pour engager la procédure disciplinaire à compter du jour où vous avez pris connaissance du ou des agissements fautifs du salarié, sauf si des poursuites pénales sont engagées dans le même délai (Code du travail, art. L. 1332-4).

Passé ce délai, les faits fautifs ne pourront pas, à eux seuls, donner lieu à l’engagement d’une procédure disciplinaire.

Une même faute ne peut pas faire l’objet de deux sanctions successives. Avec la notification de la première sanction, vous épuisez votre pouvoir disciplinaire. Si un fait fautif est sanctionné deux fois, le salarié peut demander l’annulation de la sanction.

Pouvoir disciplinaire : sanctionner plusieurs faits fautifs

Mais en présence de plusieurs faits fautifs, est-il possible d’engager plusieurs procédures ? Prendre certains faits et notifier une première sanction. Et engager ensuite une nouvelle procédure pour les faits qui n’ont pas encore fait l’objet d’une sanction.

Non, vous ne pouvez pas engager des procédures disciplinaires différentes si vous avez connaissance de plusieurs faits fautifs commis par le même salarié.

La Cour de cassation vient de juger une affaire où la salariée avait été licenciée pour faute grave. Avant cela, elle s’était vue notifier 2 avertissements : un le 21 décembre 2015 et l’autre 18 janvier 2016.

Après cela, le 4 mars 2016, l’employeur lui avait notifié une mise à pied disciplinaire. Mais lorsqu'il a prononcé cette mise à pied, il avait déjà connaissance de défaillances qui avaient été révélées par un contrôle qualité réalisé le 3 mars 2016.

Par la suite, pour ces faits fautifs connus depuis le 3 mars, elle a été, une nouvelle fois, convoquée à un entretien préalable et mise à pied à titre conservatoire le 8 mars 2016. Elle a été licenciée pour faute grave le 23 mars 2016. La salariée conteste son licenciement.

Pour la cour d’appel, l’employeur n’avait pas épuisé son pouvoir disciplinaire. Son licenciement était donc fondé. Mais la Cour de cassation casse cette décision. Lors de la notification de la mise à pied disciplinaire, le 3 mars 2016, l’employeur avait donc connaissance des défaillances qui ont été retenues par la suite à l’appui de son licenciement. Ayant connaissance de ces faits fautifs, s’il a choisi de n’en sanctionner que certains, il ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction.

Cour de cassation, chambre sociale, 9 novembre 2022, n° 21-13.224 (l'employeur qui a connaissance de divers faits fautifs ne peut pas sanctionner certains faits et ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction)

Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot