Marc Kravetz est mort le vendredi 28 octobre, à Paris, à l’âge de 80 ans. Reconnaissable à ses écharpes colorées et à son chapeau, il a été l’un des grands reporters les plus marquants de sa génération et avait couvert, essentiellement pour Libération, les conflits du Proche-Orient entre 1975 et le début des années 1990, à commencer par la guerre au Liban et la révolution iranienne.
Né le 2 octobre 1942 au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), Marc Kravetz était issu d’une famille juive aux origines modestes de la banlieue parisienne. Son père, membre du Parti communiste depuis 1932, travaillait comme secrétaire de mairie au Blanc-Mesnil. Marc Kravetz entre à l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud en 1961, mais ne passe jamais l’agrégation. Membre de l’Union des étudiants communistes (UEC), il rejoint, la même année, le Front universitaire antifasciste (FUA), fondé en pleine guerre d’Algérie et regroupant des militants communistes, socialistes et même chrétiens, tous unis contre la menace de l’OAS.
C’est là que Marc Kravetz rencontre Jean-Louis Péninou, qui sera l’un de ses compagnons de toujours, dans le militantisme comme dans la presse. Les deux jeunes hommes partent ensemble quelques mois enseigner en Algérie après l’indépendance de juillet 1962. Secrétaire général du syndicat étudiant UNEF en 1964-1965, il rejoint les Etudiants socialistes unifiés (ESU), une organisation du PSU proche de Marc Heurgon et d’André Gorz. Il reste dans la mouvance de l’UNEF et est suffisamment influent pour être cité dans le pamphlet situationniste De la misère en milieu étudiant, rédigé par le syndicaliste tunisien Mustapha Khayati et titré par Guy Debord. Avec Christian Blanc et Pierre Goldman, figure de l’extrême gauche française, il participe à l’été 1967 à une session de formation révolutionnaire et de guérilla à Cuba.
Marc Kravetz prend une part active dans les événements de mai 1968 qu’il couvrira pour Action, un journal créé le 7 mai 1968 par le journaliste Jean Schalit. On y retrouve Michel-Antoine Burnier, Frédéric Bon, Jean-Marcel Bouguereau, Bernard Kouchner, Jérôme Savary, André Glucksmann, Guy Hocquenghem, Siné, Reiser, Wolinski, Willem, etc. Après l’arrêt d’Action, au bout d’un peu moins de cinquante numéros, Marc Kravetz participe à l’aventure des Cahiers de mai, dont il est l’un des piliers. Ce bihebdomadaire popularise le reportage social et l’enquête en milieu ouvrier en donnant la parole aux travailleurs. Sa vision de pure autonomie de la classe en lutte l’oppose aux gauchistes qu’ils soient trotskistes ou maoïstes.
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