Dans les archives de Match - En 1955, le retour triomphal de Juan Carlos
À l'occasion de ses confidences exclusives publiées dans notre magazine, retour sur le triomphe du jeune Juan Carlos auprès de ses sujets en 1955... Avec Rétro Match, suivez l’actualité à travers les archives de Paris Match.
Il y a un an, éclaboussé par des scandales financiers et sentimentaux, Juan Carlos s'expatriait aux Émirats arabes unis. Sur l'île où il vit reclus au large d'Abu Dhabi, il s'est confié pour la première fois depuis son départ à Laurence Debray, sa biographe avec laquelle il a noué des liens d'amitié. Dans son livre « Mon roi déchu », à paraître le 6 octobre chez Stock, elle raconte l'aura d'un homme qui a mené sa nation vers la démocratie. Et la solitude de ce monarque qui a perdu l'estime d'une partie de l'Espagne.
Comme un mauvais tour joué par l’Histoire, Juan Carlos vit ses vieux jours comme il a vécu ses premiers, en exil. Le petit-fils du roi Alphonse XIII, chassé par l'avènement de la république en 1931, est né à Rome. Il lui a fallu attendre ses dix ans pour enfin fouler le sol de son royaume. Franco venait de proclamer sa « loi de succession » restaurant la monarchie, tout en se réservant le choix du roi, et de la date. Longtemps, le Caudillo prétextera l'instabilité du pays et la menace rouge pour écarter Don Juan de Borbón, le père de Juan Carlos. Manière aussi pour le dictateur de façonner son héritier.
Autorisé à faire ses études en Espagne en 1948, Juan Carlos retourne l’année suivante dans sa famille en exil à Estoril, au Portugal, puis retrouve son royaume, et multiplie les allers-retours. En 1955, « Juanito », prince des Asturies, 17 ans, regagne Madrid pour de bon, sous les vivats des royalistes espagnols. Nos reporters Robert Pilati et Jack Garofalo étaient présents...
Voici le reportage consacré au retour d’exil du futur roi Juan Carlos d’Espagne, tel que publié dans Paris Match en 1955.
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L'Espagne royaliste accueille Don Juan Carlos.
De nos envoyés spéciaux Robert Pilati - Jack Garofalo
L'Espagne monarchiste a acclamé son roi en la personne de l'infant don Juan Carlos de Bourbon. Son arrivée à la gare de Las Delicias, à Madrid, fut l'occasion d'une manifestation monarchiste. Mais la police n'intervint pas. Franco avait donné des ordres. Il s'était lui-même entendu, quelques jours plus tôt, avec le prétendant don Juan, pour que son fils, le prince des Asturies, quittât l'exil d'Estoril au Portugal, pour achever à Madrid des études dignes d'un futur roi.
« Juanito » a dix-sept ans. Franco voudrait lui donner le trône dans quelques années. « Malgré une excellente santé, mes soixante-deux ans me conseillent de faire tout mon possible pour que les buts établis par la Loi de Succession puissent être atteints. » Mais don Juan, comte de Barcelone, refuse encore d'abdiquer en faveur de son fils.
L'infant nous ouvre les portes de son palais d'étudiant
Pour apprendre son métier de roi, le prince-étudiant n'a droit qu'à un quart d'heure de liberté par jour. Il se lève à 8 heures et se couche à 11. Après avoir assisté à la messe dans sa chapelle personnelle, il se rend en auto au collège des orphelins de la marine, dans la banlieue. L'après-midi, équitation et culture générale chez lui avec ses professeurs particuliers.
Il se prépare à entrer, en octobre, à l'Académie militaire de Saragosse, dont il sortira officier. Il fera ensuite des stages dans une académie navale et dans une école d'aviateurs, puis d'ingénieurs. Son cycle d'études durera six ans. Son précepteur, le général Martinez de Campos, duc de la Torre, dit : «Il a la célèbre mémoire des Bourbons. »
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