Ni mort ni vif, Markus Raetz: entre deux
En guise d'hommage à l'artiste décédé cette semaine, on analyse l'un de ses tubes, «OUI/NON», que Genève a la chance d'abriter.

Il n'a jamais cessé de pulvériser les oppositions binaires. Comment, dès lors, accueillir l'annonce de son décès, mardi 14 avril, à l'âge de 78 ans, sans contourner la nouvelle et constater la vivacité de son art? L'imbroglio des apparences et la relativité des perceptions délimitaient son champ d'action. Markus Raetz ne peut pas mourir.
Née à à Büren an der Aare en 1941, cette figure majeure de l'avant-garde suisse, reconnue aux quatre coins du globe, a pratiqué tant le dessin, la peinture, la sculpture, la gravure que la photographie. Quelle que soit la technique ou le support adoptés, Markus Raetz s'est voué à fouiller l'espace entre deux point fixes, à saisir le mouvement qui s'y déploie. Explorant, en enfant de la neutralité helvétique, l'intervalle infini entre les notions du tout et du rien («Todo/Nada», 1998), comme la proximité anglophone entre le je et le nous («ME/WE», 2007). Jouant d'anamorphoses pour faire rimer la silhouette d'un lapin avec celle de son confrère Joseph Beuys, coiffé de son chapeau de feutre («Métamorphose I», 1991). Brisant le frêle contour d'un profil pour le prolonger dans un reflet de miroir («Looking Glass», 1988-92). Décomposant la tridimensionnalité d'un visage en une série de lamelles planes qui tournent dans un carrousel optique («Kopflose Mühle», 1993-2002). Ou s'extasier encore et toujours, à la façon d'un M.C. Escher avant lui, devant le mystère d'un ruban de Mœbius («Möbius Strip», 2010).
La facétie, la poésie, la modestie, aussi, qui innervent l'œuvre du Bernois, chaque Genevois peut en témoigner depuis précisément vingt ans, quand le Fonds d'art contemporain de la Ville a fait l'acquisition d'une longue perche métallique, surmontée de trois tiges de fer torsadées, et plantée au beau milieu de la place du Rhône. Totem de l'équivoque, cette sculpture mondialement célèbre, tient aujourd'hui lieu d'épitaphe à son auteur. Et de paratonnerre à nos certitudes.
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