
« J’ai tout pour vous déplaire. Octogénaire blanc, hétérosexuel, juif, ancien communiste (…), ancien directeur du “journal le plus bête de Paris”. J’allais oublier le détail qui tue : ancien énarque. » Cet autoportrait ironique, signé en 2018 par Jacques Frémontier à l’orée de son blog, n’offre qu’un bref raccourci des vies et des engagements multiples de cet homme passionné qui fut journaliste, sociologue, producteur d’émissions télévisées, historien et écrivain. Emporté par le Covid-19 à presque 90 ans, le 7 avril à l’hôpital Cochin, il est l’auteur de dix livres convoquant tous les genres, et notamment d’un best-seller « matriciel », La Forteresse ouvrière : Renault (Fayard, 1971), qui a marqué la sociologie du travail par son style d’enquête.
Né Jacques Friedmann le 8 mai 1930 dans une famille juive ashkénaze commerçante du Marais, il grandit dans un milieu bourgeois si athée, laïque et assimilé qu’enfant, il ignore qu’il est juif. Ecolier chez les bonnes sœurs de l’Institut Dupont-des-Loges qui lui demandent sa religion, il répond « parisien » et le sera, en effet, jusqu’à la publication des décrets antisémites de 1940 qui lui apprendront cruellement sa « nouvelle identité ».
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