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[02] Fernand Pelloutier (1867-1901)

lundi 30 mars 2020, par Georges Yvetot (Domaine public)

Il y a eu dix ans le 13 mars dernier que mon ami Fernand Pelloutier est mort. Son souvenir vit en moi et son œuvre reste inoubliable et féconde pour tous.

Après une longue et terrible maladie, il s’éteignit, terrassé par une laryngite tuberculeuse. Il mourut bien modestement, après une vie de misère matérielle et physique, cachant jusqu’à la fin tout ce qu’il souffrait d’un lupus tuberculeux qui, après lui avoir ravagé une partie du visage, lui atteignit le larynx. Devant sa volonté de vivre et d’agir il fallut que la Mort le prît à la gorge pour en venir à bout.

Dans le monde ouvrier, dans le mouvement syndical, la disparition de Pelloutier a creusé un grand vide. Dix ans déjà, depuis le jour où, très rares, quelques amis conduisirent au petit cimetière des Bruyères-de-Sèvres, celui qui restera toujours pour nous un modèle de courage, de volonté et de désintéressement.

Il mourut à trente-trois ans, dans une maisonnette des bois de Bellevue, où son médecin l’avait obligé de se réfugier dans l’espoir de prolonger un peu ses jours.

Quelle abondante tâche cet homme perpétuellement souffrant sut accomplir, pressentant sa fin prochaine ! Et ce pauvre ami, si courageux, s’il eut un sentiment de regret au moment de quitter la vie matériellement si laide pour lui, ce fut moins de laisser ce qu’il affectionnait le plus : sa, famille et ses livres, que de laisser inachevée la rude besogne d’éducation et d’organisation du prolétariat ; car c’était à l’émancipation ouvrière qu’il s’était voué tout entier et c’est pour elle qu’il égrena sans regret ses jours.

Cependant, il laissait derrière lui, prospère et devenu indispensable au monde syndicaliste, un organisme ouvrier dont il fut l’âme après en avoir été le créateur : la Fédération des Bourses du Travail de France et des Colonies.

II laissait aussi un bel ouvrage auquel son frère Maurice collabora : la Vie Ouvrière en France et le manuscrit d’une Histoire des Bourses du Travail que Maurice édita après la mort de son frère.

Ces livres sont devenus comme le bréviaire du militant sérieux qui veut savoir ce que fut le mouvement ouvrier à la fin du siècle dernier.