Déstabilisé par le rachat de Monsanto, Bayer brandit la carte du développement durable
Alors que l'acquisition de Monsanto a terni son image, le géant allemand de la chimie a annoncé mardi s'être fixé un objectif de neutralité carbone d'ici à 2030, doublé d'engagements socialement responsables.
Par Ninon Renaud
Avant d'acquérir Monsanto, le patron de Bayer avait manifestement sous-estimé les doutes émis sur le caractère cancérigène du glyphosate. Il martelait encore au printemps que l'herbicide contenu dans son Round'up« est un produit sûr qui ne pose pas de risque de cancer s'il est utilisé correctement ». La série de plaintes catastrophiques dont il fait l'objet outre-Atlantique et la colère de ses actionnaires semblent avoir achevé de convaincre Werner Baumann qu'il devait mettre en avant les efforts fournis par le groupe dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.
Il ne s'agit pas de ce que le gouvernement exige de nous, mais de ce que nous estimons juste
Près d'un an après avoir recruté chez Mars Matthias Berninger en tant que responsable des affaires publiques et des questions de développement durable, le géant allemand de la chimie a ainsi annoncé mardi s'être fixé un objectif de « neutralité carbone d'ici à 2030 ». Un objectif qu'il compte atteindre grâce à un programme de réduction et de compensation de ses émissions de gaz à effet de serre. « On ne peut pas attendre une politique climatique nationale. Il ne s'agit pas de ce que le gouvernement exige de nous, mais de ce que nous estimons juste », souligne Werner Baumann dans une tribune publiée dans le « Handelsblatt », le grand quotidien économique allemand.
Lutte contre le CO2 et la pauvreté à la fois
Une déclaration qui a pu faire tiquer les organisations de défense de l'environnement alors que les émissions de CO2 de Bayer ont augmenté de 2,1 millions de tonnes pour atteindre 5,5 millions de tonnes en 2018. Le groupe compte néanmoins repasser sous la barre de 4 millions de tonnes en 2019 et supprimer progressivement ses émissions de CO2, en ayant recours massivement aux « énergies renouvelables », en « prenant des mesures d'efficacité énergétiques ». Le résidu sera compensé par l'achat de certificats d'émissions.
Accusé de maltraiter les petits exploitants agricoles, Bayer s'engage par ailleurs à soutenir d'ici à 2030 100 millions de petits fermiers dans les pays en voie de développement pour les aider à développer leurs exploitations de façon à réduire leur empreinte écologique. Leader mondial des contraceptifs hormonaux et de médicaments en vente libre, le groupe veut en parallèle adapter ses prix dans ces pays afin d'améliorer la vie des populations de ces régions.
Werner Baumann promet la mise en place d'objectifs mesurables dès 2021, un suivi avec la mise en place d'un « conseil indépendant de durabilité » pour accompagner le conseil d'administration, ainsi que l'intégration de cette thématique dans les critères de rémunération variable des équipes d'encadrement. La viabilité va « devenir un élément à part entière de notre activité et de notre succès économique de long terme », a résumé Werner Baumann.
Ninon Renaud (Correspondante à Berlin)