Paris : venez récolter du safran sur le toit du lycée hôtelier

Les soeurs Bien élevées cultivent désormais le safran sur une demi-douzaine de sites à Paris et en banlieue. Les habitants peuvent participer aux récoltes.

 Lycée hôtelier Guillaume-Tirel, boulevard Raspail (XIVe). Les élèves ont semé les bulbes et s'apprêtent à faire leur première récolte.
Lycée hôtelier Guillaume-Tirel, boulevard Raspail (XIVe). Les élèves ont semé les bulbes et s'apprêtent à faire leur première récolte. DR

    Après l'Institut du monde arabe (Ve) puis le toit plat d'un supermarché du XIIIe, les sœurs « Bien élevées » – le nom qu'elles ont donné à leur aventure et leur entreprise – continuent leur ascension des toits de Paris, pour y créer des safranières.

    20 000 bulbes sur le toit du lycée Guillaume-Tirel

    Leur dernier lopin de terre s'étire sur les 300 m2 de terrasses surplombant le lycée hôtelier Guillaume-Tirel, boulevard Raspail (XIVe), où les Bien élevées ont monté 60 m3 de terre et planté, avec l'aide des futurs professionnels de la restauration et de l'hôtellerie, quelque 20 000 bulbes de safran. Il y a quelques semaines, ils en guettaient les premières pousses, signes annonciateurs d'une récolte qui pourra commencer dans quelques jours.

    Facile à faire pousser, « l'or rouge » exige de cueillir la fleur sitôt son éclosion, afin d'en prélever les précieux filaments. « Ces 20 000 bulbes devraient donner une récolte de 150 g, estime Amela de Bessey, l'aînée des sœurs Bien élevées. L'an prochain, comme chaque bulbe en donnera un autre, la récolte doublera… Le safran se plaît sur ces toits, il est rustique et il se fiche de la chaleur. Pour les pluies, nous avons prévu un substrat assez léger, bien drainé ».

    Amela, l’aînée des sœurs Bien élevées./ LP/Elodie Soulié
    Amela, l’aînée des sœurs Bien élevées./ LP/Elodie Soulié DR

    A Guillaume-Tirel, lycée réputé pour ses 97 à 100 % de réussite, son restaurant et même un hôtel d'application, mais aussi pour son projet d'établissement « E3D » – Ecole en Démarche de développement durable –, le partenariat avec les Bien élevées a germé d'un autre projet : l'installation de 6 ruches, cet été sur un toit de béton.

    Utilisé par les grands chefs

    Une partie de la récolte sera utilisée directement au restaurant d'application. Production locale, débouché local, les élèves participeront eux-mêmes à toutes les étapes, de la plantation des bulbes à l'émondage ou au séchage des filaments, puis plus tard… en cuisine, dans les recettes spécialement créées.

    C'est l'autre fierté des 4 sœurs, qui ont déjà séduit plusieurs grands chefs. « L'un d'eux a créé des plats signatures et un dessert avec notre safran, confirme Amela. C'est une belle reconnaissance d'une production de qualité, pour nous c'est très important de montrer que l'on peut produire en ville et de qualité ».

    700g de safran, tous sites confondus

    Passé au microscope des ingénieurs d'AgroParisTech, l'Institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement, le safran des Bien élevées a d'ailleurs reçu leur bénédiction : arôme, parfum, couleur, « il a été classé catégorie 1 des normes Iso, donc premier sur un classement de 5 niveaux », précise la jeune femme.

    Tous leurs sites confondus – à Paris ainsi que sur un terrain de sports de Montrouge (Hauts-de-Seine) et une entreprise d'Ivry (Val-de-Marne) – les safranières misent cette année sur « environ 700 g de safran ».

    Entre 30€ et 40€ le gramme

    A l'aune d'une production française qui n'atteint pas les 100 kg par an, c'est déjà honorable. Et s'il revient un peu plus cher que le prix moyen du marché, de 30 à 40 € le gramme, c'est « qu'il demande un peu plus de travail », s'excuse presque Amela, qui rêve de voir le pays renouer avec une culture autrefois abondante et facile.

    Et quelle meilleure méthode que d'y associer les habitants voisins de la safranerie ? Pour la récolte à venir, les Bien élevées proposent des ateliers à partir de samedi prochain et jusqu'au 5 novembre tous les matins, pour la cueillette et l'émondage.

    « Les gens ne repartiront bien sûr pas avec leur safran, puisqu'il faut le faire sécher, mais chacun aura son souvenir safrané » promet Amela. « Nous voulons vraiment nous inscrire dans le tissu local, donc impliquer les gens, les commerçants, les artisans des métiers de bouche », insiste-t-elle.

    Les inscriptions sont ouvertes à tous, sur le site des Bien Elevées.