Il était l’un des plus grands directeurs de la photographie français, l’un de ceux dont la filmographie flamboie, avec près de quatre-vingts films tournés, dont les titres et les noms de leurs réalisateurs forcent le respect. Il fait partie de cette génération qui avait conquis ses lettres de noblesse dans les années 1960, dont font partie Ghislain Cloquet, auprès de qui il s’est formé, Raoul Coutard ou William Lubtchansky.
Né le 5 avril 1930 à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), Pierre Lhomme est mort le 4 juillet à Arles (Bouches-du-Rhône). La tentation musicienne lui aura passé suffisamment vite pour qu’il s’inscrive, au début des années 1950, à l’Ecole nationale supérieure Louis-Lumière. Les choses sérieuses commencent pour lui en 1958, dans un hôtel de la Contrescarpe, dans le 5e arrondissement de Paris.
Là – ainsi que le rappelait le réalisateur Jean-Paul Rappeneau lors d’un hommage rendu en 2008 par la Cinémathèque française au chef opérateur – s’affairaient sur le plateau du court-métrage intitulé Un Américain quelques individus appelés à devenir plus célèbres qu’ils ne l’étaient alors. On nommera le réalisateur Alain Cavalier, son assistant Maurice Pialat, ainsi que son producteur Claude Chabrol, qui s’apprêtait de son côté à tourner Le Beau Serge. On en déduirait à tort que Lhomme, qui cadrera l’année suivante le premier long-métrage d’Eric Rohmer (Le Signe du Lion, 1959), se destinait à accompagner la Nouvelle Vague.
Une souplesse d’esprit et de pratique déconcertante
Hors d’elle, et c’est l’extraordinaire richesse du cinéma français, les talents les plus divers ne manquaient pas, au service desquels il mit sa science de la lumière et du cadrage. Alain Cavalier tout d’abord, auquel il restera longtemps fidèle dans la période « industrielle » de ce cinéaste si singulier, collaborant au Combat dans l’île (1962), à Mise à sac (1967), à La Chamade (1968).
Par ailleurs, Lhomme, avec une souplesse d’esprit et de pratique déconcertante, se partage entre deux grandes écoles. Celle de l’arraché jeté d’un cinéma moderne qui exige légèreté, adaptabilité, promptitude, improvisation parfois. Et celle, plus posée, plus composée, plus picturale, d’un cinéma d’auteur qui esthétise la forme. Dans la première catégorie, le premier titre de gloire se nomme Le Joli Mai, de Chris Marker.
On est en 1963, les caméras légères et le son synchrone font leur apparition, le cinéma direct prend son essor. Jean Rouch et Edgar Morin l’ont lancé en 1961 sous forme d’enquête dans les rues de Paris avec Chronique d’un été. Dans Le Joli mai, Marker et Lhomme, qui deviendra en cours de route coréalisateur du film en plus de l’avoir photographié, se mettent dans ce sillage et vont à la rencontre des Parisiens, dressant le portrait mouvant et émouvant, d’une extraordinaire acuité, d’une société en voie de mutation.
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