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Critique : Music of My Life (Blinded by the Light)

Repéré à Sundace en début d’année puis à Toronto en mai dernier, le nouveau film de la réalisatrice anglaise Gurinder Chadha (Joue la Comme Beckham, Le Journal Intime de Georgia Nicholson) avec Viveik Kalra sortira dans les salles françaises le 11 septembre prochain.

 

LA CRITIQUE

J’ai découvert Bruce Springsteen à la télévision un soir de 1993. Dans la célèbre émission MTV Unplugged, il chantait à des jours meilleurs guitare électrique en main. Depuis ses textes, sa musique et ses concerts (17 dans trois pays) ont accompagné ma vie. Des moments de joie, des moments de tristesse, des moments intense. Des émotions, toujours fortes, associées à chaque disque, à chaque concert et à chaque souvenir lié à des paroles. Ca n’a rien d’exceptionnel : tout le monde a un artiste, une œuvre auquel il associe des moments de sa vie. Mais quand un film l’évoque, il  y a forcément un truc.

Music of My Life raconte bien ce que le titre « français » veut dire. Ce titre… Non content de vouloir proposer de l’anglais « simple » à un public qui ne le comprend pas toujours correctement, le distributeur a choisi de modifier le titre original, référence à la chanson, par la formule la plus générique possible. En oubliant que le titre apparait à l’écran via un plan très lumieux censé éblouir le specteur. Mais passons.

Music of My Life, donc, raconte l’histoire vraie du journaliste Sarfraz Manzoor et sa découverte de la musique de Bruce Springsteen. Il en a co-écrit le scénario d’après sa biographie « Greetings from Bury Park » désormais romancée. Les noms ont changé, le contexte est un peu différent mais les origines du héros ne changent pas. Il est un jeune Pakistanais installé dans une grande banlieue de Londres dans une famille très stricte, dirigée par un père dont les idées ne sont plus en phase avec son époque. Et à une période formidable pour la musique anglo-saxonne (le milieu des années 80), le jeune héros va se prendre en pleine face toute la puissance du E-Street Band.

Javed (c’est son nom) aime écrire. Des poèmes, des paroles de chansons pour son meilleur pote et des textes pour le cours de littérature. Mais son père, lui, veut la réussite de son fils. Il veut qu’il ramène de l’argent pour sa famille, fasse de grandes études et « ne finisse pas chauffeur de taxi ». Deux visions opposés dans un monde qui bouge, puisque le film rappelle que nous sommes en pleine crise en Angleterre. Le chômage est au plus haut sous Margaret Tatcher et le racisme malheureusement omniprésent. Javed, qui n’intéresse donc personne, va trouver son salut dans les textes de Bruce. Celui qui est né pour courir et qui a cherché sa place dans la vie à travers d’innombrable disques va lui parler. Parce que « Bruce est la réponse à tout ce qui est pourri dans ce monde ».

Un soir d’orage, alors que ses textes qu’il a mis la benne se mettent à danser dans le noir, il va découvrir Dancing in the Dark. La chanson évoque un personnage fatigué, qui a besoin d’un déclic pour prendre sa vie en main.

Message keeps getting clearer
Radio’s on and I’m moving ’round the place
I check my look in the mirror
I wanna change my clothes, my hair, my face
Man I ain’t getting nowhere
I’m just living in a dump like this

Mise en scène par Gurinder Chadha (Joue-La comme Beckham), la séquence est peut-être une des plus belles du film. Le gamin va enchainer alors avec The Promised Land -qui deviendra la chanson principale- et comprendre que sa vie a plus de sens qu’il ne le croyait.

I packed my bags and I’m heading straight into the storm
Gonna be a twister to blow everything down
That ain’t got the faith to stand its ground
Blow away the dreams that tear you apart

A partir de ce moment-là, tout le film va s’articuler autour des chansons de Bruce Springsteen. On y verra des scènes de héros marchant en chantant dans la rue avec une bonne humeur qui rappelle le Sing Street de John Carney mais aussi des séquences où, paroles à l’écran, le montage est calé sur le texte. Javed tombera amoureux sur Thunder Road. Et chopera la fille sur Prove It All Night, bien évidemment.

Show a little faith there’s magic in the night
You ain’t a beauty but hey you’re alright
Oh and that’s alright with me

Si vous aimez la musique du Boss, vous serez en terrain conquis tant la combinaison des images et des chansons fonctionne à merveille. Si vous avez grandi avec la musique de Bruce Springsteen et que vous vous retrouvez au moins un peu dans ses textes, vous verrez certaines scènes à travers des rideaux de larmes.

Difficile pour moi d’imaginer ce que le film ferait à un total néophyte. Mais comme le dit si bien l’un des protagonistes, tout le monde a un artiste ou une oeuvre à se raccrocher, que ça soit Bruce ou un autre et peut-être que la clef est là.

Reconnaissons quand même quelques défauts, à commencer par un manque flagrant de budget qui fait que l’histoire est tournée dans trois décors. Et puis Gurinder Chadha a une mise en scène bien trop sage, à de rares exceptions prêts. Impossible de ne pas penser aux superbes plans de Danny Boyle pour Yesterday, à sujet égal. Le film aurait pu être plus fort encore dans les mains d’un réalisateur qui avait d’avantage à apporter.

Les puristes, eux, prendront un plaisir infini à se replonger dans les premiers textes du Boss dont le 19e et bien différent des autres album studio vient de sortir. Ils apprécieront aussi que « I Stand By You Always », chanson que Springsteen a écrit à une époque où il lisait Harry Potter à son fils trouve enfin une existence officielle après avoir longuement circulé sous le manteau. Ils feront enfin un parallèle entre la relation père/fils du héros de Blinded by The Light et celle du chanteur, qui a longuement vécu dans l’ombre d’un père compliqué.

Porté par des acteurs qui prennent du plaisir à l’écran (dont Nell Williams, véritable révélation), Music of My Life (décidément, ce titre…) est ce qu’on appelle un « feel good movie » qui donne envie se replonger dans son adolescence, vieux walkman à cassette sur les oreilles et chemise à carreaux pour ressembler à son idole. Il laissera peut-être quelques cinéphiles adeptes d’histoires moins limpides sur le côte mais les fans -dont je fait partie- et des belles histoires seront en terrain conquis. Espérons que les autres y trouvent, comme le héros, et comme mon moi-même de 1993, le déclic dont ils ont besoin pour trouver leur voie.

Everybody’s got a hunger, a hunger they can’t resist,
There’s so much that you want, you deserve much more than this,
But if dreams came true, oh, wouldn’t that be nice,
But this ain’t no dream we’re living through tonight,
Girl, you want it, you take it, you pay the price.

Music of My Life (Blinded by the Light), de Gurinder Chadha – Sortie le 11 septembre 2019

 

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