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« La transition énergétique, une chance pour l'agriculture »

« La transition énergétique, une chance pour l'agriculture »
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Publié le 7 mars 2018 à 09:39
« La transition énergétique, une chance pour l'agriculture »

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Pour Olivier Dauger, élu FNSEA en charge des questions climatiques et énergétiques, la transition énergétique est une chance de créer une dynamique économique supplémentaire pour le monde agricole.Quelques heures avant l’ouverture du 54e Salon de l’agriculture, l’Ademe avait publié les résultats de son étude sur les avancées du secteur agricole en matière de transition énergétique.Bilan : en 2017, l’agriculture française pesait pour environ 20% de la production nationale d’énergies renouvelables, où « toutes les filières », selon l’agence, participaient.Au total, ce sont 15% des exploitations du pays, quelque 50 000, qui sont engagées dans cette voie. Du bonus pour l’environnement mais aussi pour les agriculteurs : l’Ademe évalue à 15 000 euros, en moyenne, le revenu supplémentaire généré sur l’année par l’exploitant qui se serait lancé sur les énergies renouvelables.

Olivier Dauger, élu FNSEA en charge des dossiers climat et énergie, en dit plus sur les enjeux, notamment économiques, de la transition énergétique pour l’agriculture française.

Transition connectée : Quel est le rôle du monde agricole dans le processus de transition énergétique ?

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Olivier Dauger : C’est un vrai défi pour l’agriculture, qui est victime du climat. Elle est aussi la cause d’une partie des émissions de gaz à effet de serre, mais elle est surtout une solution.Elle est une solution pour capter le carbone et produire de l’énergie -photovoltaïque sur ses toits, éolien sur ses champs et méthanisation par ses effluents, ses déchets. Il ne faut pas oublier qu’avant l’ère fossile, l’agriculture fournissait l’énergie, depuis la nuit des temps.Elle se met à fond là-dedans parce que l’équation est globale : la transition énergétique permet aussi de diversifier les revenus de l’agriculteur, pour des exploitations plus durables.

C’est tout un ensemble de choses positives pour la société comme pour l’agriculture.

TC : Où en sont les agriculteurs de la production d’énergies renouvelables ?

O.D. : Ça démarre. La volonté du monde agricole est très forte sur le photovoltaïque bien sûr. L’éolien, sur le plan territorial est plus compliqué à développer parce que « l’acceptation » est plus compliquée, surtout lorsqu’il y a concentration.Derrière, il y a des projets de méthanisation qui sortent. Au début, ils étaient surtout liés à l’élevage, pour diminuer l’impact des effluents sur l’environnement. Aujourd’hui, même dans les zones de polyculture-élevage voire de polycultures, il y a des projets. On a dans les tuyaux entre 300 et 400 projets au total et beaucoup d’agriculteurs se renseignent auprès des Chambres d’agriculture.On peut répondre à l’enjeu qui est de 30% de gaz vert en 2030. Le potentiel est là, les hommes sont là, le territoire est là. Après, il y a un travail à faire de normalisation de la part de l’Etat. C’est anormal que l’on mette encore quatre ans à faire un méthaniseur en France alors qu’on met un an maximum dans les pays voisins.Il faut aller plus vite, il faut trouver du cautionnement parce que la situation économique du monde agricole est telle que les banques, sur des projets de quatre à cinq millions d’euros, demandent des cautions importantes.A côté de l’électrique, notamment sur les transports, le gaz vert pourra être un carburant tout aussi intéressant notamment en matière de pollution puisqu’il ne pollue pas plus que l’électrique, si l’on compte la fabrication des batteries. Il y a un mix énergétique à trouver : l’électricité peut être plus en ville parce que l’on roule moins et le gaz à la campagne parce que les distances sont plus longues.

« La transition énergétique, des projets de territoires sur tout le territoire »

TC : Quels freins subsistent à l’adoption des énergies renouvelables ?

O.D. : Il faut encore plus aider au développement d’une filière en amont, une filière de fabricants. On a un peu « piétiné » sur la méthanisation depuis cinq à dix ans, ce qui fait qu’en l’absence de dynamique, il n’y a pas de filière en amont. La technique, scientifiquement, existe. Maintenant il faut la développer, il faut que les entreprises investissent dedans.En France, on a parfois tendance à d’abord parler des normes et de la fiscalité. Or ne commençons pas par nous mettre des barrières, développons avant. On développe, on crée la dynamique et ensuite on adapte les normes au fur et à mesure. C’est, apparemment, la volonté de Sébastien Lecornu (secrétaire d'Etat auprès du Ministre de la transition écologique et solidaire, ndlr), qui a vraiment envie de bouger les lignes.L’agriculture est une chance pour la transition énergétique de la France mais la transition énergétique est aussi une chance pour l’agriculture, car elle peut permettre une meilleure durabilité des exploitations.

TC : En quoi la transition énergétique peut-elle être une opportunité économique pour les agriculteurs ?

O.D. : Elle permet de valoriser des choses que l’on ne valorisait plus sur nos exploitations. On est sur un marché complètement ouvert, mondial. Soit on est compétitif, soit on ne l’est pas. Et l’un des moyens de l’être, c’est de permettre aux agriculteurs de valoriser toute la partie énergétique de leur exploitation.L’agriculture, c’est d’abord la photosynthèse et par la photosynthèse, on crée de l’énergie, avec le soleil, le sol et l’eau.  Aujourd’hui, on a les moyens de dire à l’agriculteur que ses effluents, qui valaient zéro hier, valent désormais quelque chose. Les couverts végétaux qu’on va lui demander de faire pour capter le carbone et protéger les sols lui coûteront un peu mais il va pouvoir les valoriser par du gaz.

L’Ademe évalue les revenus moyens d’un méthaniseur à 15 000 euros par an, quand on sait que le revenu médian des agriculteurs se situe entre 10 000 et 12 000 euros en ce moment… C’est un plus, réel, qui n’est pas volé, d’autant que l’on répond en même temps à des problèmes environnementaux et des enjeux climatiques. Pour ça, il faut garder une agriculture dans les territoires, une agriculture de production.

TC : Avec ces transformations, à quoi ressemblera l’agriculture française dans les quinze ou vingt ans qui viennent ?

O.D. : Elle sera beaucoup plus basée sur l’économie circulaire. La transition énergétique, cela va être des projets de territoires, dans tout le territoire. Les territoires ruraux rencontrent des difficultés, face à une métropolisation qui s’accélère. Cette transition sera une manière de leur redonner une dynamique en en faisant, pourquoi pas, des territoires autonomes énergétiquement grâce, pour partie, à l’agriculture.  Demain, rien ne sera perdu sur l’exploitation, même ses déchets serviront à quelque chose. C’est une mutation très logique. On est vraiment aussi dans le sens de ce que veulent les gens, c’est-à-dire une économie plus circulaire, une économie qui ne ferme pas les frontières mais qui valorise au mieux ce qui est sur place avant d’aller chercher des choses loin.

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