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L’élue mélenchoniste qui milite sur les planches

Danielle Simonnet, élue du Parti de gauche au Conseil de Paris, tente de faire passer ses idées politiques sur scène dans un one-woman-show décapant.

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Publié le 22 novembre 2016 à 10h37, modifié le 22 novembre 2016 à 14h54

Temps de Lecture 3 min.

Danielle Simonnet se lance dans la politique spectacle (ici avec Éric Coquerel, co-coordinateur du Parti de gauche, le 5 juin, à Paris).

Danielle, tu devrais faire du théâtre ! », lui disait, enfant, sa grande sœur. Vingt ans de carrière plus tard, au PS d’abord et, depuis 2008, au Parti de gauche (PG), Danielle Simonnet, connue pour ses diatribes au Conseil de Paris contre la société Uber, a finalement réalisé qu’il lui fallait combiner ses deux vocations pour mieux se faire entendre. « Comme l’avait compris Gramsci, pour gagner la bataille politique, il faut d’abord gagner la bataille culturelle », affirme celle qui croit bien plus au pouvoir des romans d’Émile Zola et des chansons de Renaud qu’à celui des discours savants. Quadragénaire au naturel rieur et à la voix puissante, Danielle Simonnet s’est donc trouvé une seconde tribune au Théâtre Clavel, dans le 19e arrondissement parisien. Pour la deuxième fois depuis octobre, elle est venue, le 13 novembre, parler d’Uber, des « salauds » et de ses « ovaires balèzes », face à un public de chauffeurs de taxi, de compagnons de luttes et d’une poignée de curieux.

Une autre façon de faire réfléchir

Robe rouge décolletée, ambiance potache. La salle écoute, jubile, s’émeut, commente et blague avec l’ovni politique. À l’aide d’une pile de gobelets qu’elle remplit d’eau, écrase et répand sur le sol, l’élue mélenchoniste veut faire réfléchir sur les dangers de la déréglementation du travail, de l’oppression capitaliste ou promouvoir l’égalité des sexes. Un stand-up militant personnel, inspiré des « conférences gesticulées » de Franck Lepage, rapporteur au ministère de la jeunesse et des sports en 1994 et théoricien de l’éducation populaire. « Je suis tombée il y a dix ans sur la vidéo d’un de ses spectacles. Aujourd’hui, je me souviens toujours de son histoire de poireaux et de parapente pour expliquer la crise de la culture, alors que j’ai complètement oublié son rapport gouvernemental. »

Adolescente passionnée de politique, Danielle Simonnet avait, dès le collège, lors d’un débat sur la peine de mort animé par son professeur d’éducation civique, compris le pouvoir de la métaphore et de l’interaction comme moyen d’éducation. Plus tard, elle a repris le procédé. En 2005, elle a créé des ateliers de lecture sur le traité constitutionnel européen. « Plutôt que d’expliquer pourquoi il fallait voter contre, je laissais le groupe construire sa conscience personnelle à partir d’extraits du texte », soutient-elle.

Humour et convictions

Contre Lactalis ou le travail le dimanche, la femme politique interpelle les électeurs sur Internet avec des vidéos au ton décalé. Dernièrement, elle s’est encore illustrée dans le métro contre la loi travail, en se faisant passer avec ses copains « nuitdeboutistes » pour une bande de macronistes enragés. Un style commedia dell’arte assumé, qui lui a parfois fait défaut. Lors des municipales de 2014, certains collègues critiquent sa candidature comme chef de file du Parti de gauche, trouvant qu’elle n’a pas « l’envergure d’un dirigeant national ». Depuis, Danielle Simonnet a su s’imposer.

« Quand, à droite, on assiste au débat de sept affreux qui ressassent les mêmes discours libéraux depuis trente ou quarante ans, ça me démange. »

Gagnante d’une triangulaire dans le 20e arrondissement de Paris avec le meilleur score du parti, elle siège à présent au Conseil de Paris et a été nommée en 2015 co-coordinatrice du PG. Fidèle à elle-même, c’est sur scène, grâce à l’humour et à l’émotion, qu’elle pense pouvoir « convaincre le mieux les cœurs et les consciences ». « Je veux casser les codes ! Shooter dans la fourmilière !, s’exclame-t-elle. Quand, à droite, on assiste au débat de sept affreux qui ressassent les mêmes discours libéraux depuis trente ou quarante ans, ça me démange. »

Le producteur de Jamel à la mise en scène

L’idée du one-woman-show a surgi cet été, après qu’une de ses amies l’a entraînée à un stage de deux semaines de conférences gesticulées. « À la fin, il fallait présenter son petit spectacle à un public. Ce fut un triomphe ! » Quelques semaines plus tard, elle rencontre à la Fête de L’Huma Alain Degois, le producteur de Jamel Debbouze et d’Arnaud Tsamère. Il devient son metteur en scène et, bientôt, Danielle joue les Guy Bedos. « Le risque était qu’on ne me prenne plus au sérieux, mais, au contraire, j’ai gagné en crédibilité », assure-t-elle. Si aucun de ses anciens collègues du PS n’est encore venu la voir, ses amis du PG se déclarent fiers. « Danielle pourrait soulever des montagnes », a confié la députée Martine Billard à la sortie du théâtre.

Essoufflée après plus d’une heure et demie de pédagogie politique enflammée, terminée par une séance photos avec les « taxis d’élite » venus féliciter leur protectrice, l’oratrice convie tout le monde à venir boire des coups au bistrot du coin. « En sortant, vous tournez à gauche – bien évidemment. »

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