Nenous Thabit, 17 ans, habitait à Mossoul, dans le nord de l’Irak, avant que l’Etat islamique (EI) ne l’occupe en 2014. Au Kurdistan, où il s’est réfugié avec sa famille, il garde un lien avec sa terre natale en fabriquant des répliques de statues détruites de la cité de Nimroud, capitale de l’ancien empire assyrien située à 34 km de Mossoul. Il appelle ça « lutter par l’art » contre les djihadistes.
En 2015, l’EI avait mis en scène la destruction des trésors archéologiques de Nimroud. L’Unesco avait dénoncé un « crime de guerre ». Désormais repris par l’armée irakienne, ce joyau archéologique est en effet très abîmé.
Pour Nenous Thabit, les pièces archéologiques de Nimroud sont son héritage culturel direct. Formé par son père, lui-même sculpteur, il décide de ressusciter les objets saccagés, telle cette statue de taureau androcéphale, fameuse divinité assyrienne à tête humaine, à corps de taureau (ou de lion) et à ailes d’aigle. Sa « statue préférée », disait-il à CNN.
« En Irak, des gens sont assassinés parce qu’ils pratiquent la sculpture et l’art. Continuer à sculpter devient donc un message pour dire que nous ne nous laissons pas intimider. »
En un an, le jeune artiste dit avoir réalisé 18 statues assyriennes et une fresque. Il a reproduit par exemple le code d’Hammurabi, un texte juridique de la Mésopotamie antique, réplique devant laquelle il pose sur sa page Facebook :
Les frontières de l’Irak correspondent, avec une frange syrienne, à l’ancienne Mésopotamie, berceau d’une des plus anciennes civilisations et de la naissance de l’histoire avec celle de l’écriture. L’EI, en s’emparant de cette zone, a mené une opération de destruction de toute trace civilisationnelle antérieure à l’islam. Nimroud mais aussi la cité parthe d’Hatra et le Musée des beaux arts de Mossoul ont été partiellement détruits. Outre les mises en scène en vidéo, les djihadistes pillent les sites et les musées pour alimenter un juteux marché de revente des œuvres d’art.
En Syrie, la cité de Palmyre a été occupée de mai 2015 à mars 2016. Certains édifices parfois vieux de 2 000 ans ont été totalement ou partiellement détruits, et Khaled Al-Asaad, ancien directeur du site, a été assassiné. Selon l’Unesco qui a pu constater les dégâts depuis la reprise du site par l’armée de Bachar Al-Assad l’ensemble du site archéologique conserve cependant « pour une grande partie son intégrité et son authenticité ».
Des sculpteurs syriens avaient eu la même idée que Nenous Thabit, reproduisant plus ou moins fidèlement 40 statues et objets historiques.
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