Depuis le 1er janvier, il est possible de divorcer par consentement mutuel sans passer devant un juge, une mesure de la loi « justice du XXIe siècle » définitivement adoptée en octobre. La nouvelle procédure, qui a pour but d’alléger les procédures et de désengorger les tribunaux, prévoit que ce soit un notaire qui valide le divorce entre les ex-époux, qui doivent chacun être représenté par un avocat. Critiquée pour son surcoût et la crainte de déséquilibre entre époux, elle bouleversera encore les modalités du divorce, qui concerne chaque année plus de 120 000 couples (pour 240 000 mariages). Etat des lieux.
1. Du divorce pour faute au consentement mutuel
L’une des évolutions majeures en matière de séparation a été l’instauration, en 1975, du divorce par consentement mutuel, qui permet de se séparer « à l’amiable », en signant une convention par laquelle les époux se mettent d’accord sur la rupture du mariage et ses conséquences.
Les autres types de divorce sont de type contentieux :
- pour faute : si l’un des époux a commis une violation « grave ou renouvelée des devoirs et obligations liées au mariage » (violence, adultère). La faute doit être prouvée devant le juge ;
- pour altération définitive du lien conjugal, si les époux vivent séparément depuis au moins deux ans ;
- pour acceptation du principe de la rupture du mariage (« divorce accepté ») : les époux sont d’accord pour se séparer mais n’arrivent pas à s’entendre sur les conséquences (garde des enfants, partage des biens) ;
- par conversion d’une séparation de corps (équivalent partiel d’un divorce : le couple reste marié mais n’a plus d’obligation de vie commune).
En quarante ans, le divorce par consentement mutuel est entré dans les mœurs : il représente désormais plus de la moitié (53 %) des dossiers. La loi de 2004 a encore accru l’attractivité de la procédure. Accélérée et simplifiée, elle a connu un pic en 2005 avant de se stabiliser.
2. Consentement ou contentieux, un divorce à deux vitesses
La loi adoptée en octobre par les députés vise à simplifier encore le divorce par consentement mutuel, qui pourrait désormais se régler très rapidement devant un notaire. Pourtant, la simplification était déjà bien engagée depuis la réforme de 2004 (une seule audience devant le juge au lieu de deux), puisque la durée moyenne de la procédure a été divisée par quatre.
Cela creuse encore l’écart avec le divorce contentieux, nettement plus long, puisqu’il implique un délai de réflexion laissé aux époux.
3. Le profil type : des quadras mariés depuis quinze ans
Selon le ministère de la justice, les divorces sont prononcés en moyenne après quinze ans de mariage. Mais cette durée est un peu inférieure pour les divorces par consentement mutuel. En revanche, certains couples déjà séparés de fait n’hésitent pas à officialiser leur rupture après un délai très long, près de vingt-neuf ans.
Les hommes divorcent en moyenne à l’âge de 43 ans, contre 41 ans et demi pour les femmes. Généralement plus jeunes lors de leur mariage, les femmes divorcent également à un âge inférieur à leurs époux.
4. Plus de divorces dans le Sud que dans l’Ouest
Les données des tribunaux de grande instance, qui enregistrent les divorces, font apparaître une importante disparité entre les départements. En les comparant à la densité de population, on note que les divorces sont plus fréquents dans les grandes villes, notamment à Paris, et dans le sud de la France que dans l’ouest, où la tradition catholique est plus prégnante.
5. De très nombreux enfants au cœur des procédures
La plupart des couples mariés qui se séparent avaient fondé une famille. Par conséquent, plus de la moitié (53 %) des divorces prononcés en 2014 impliquait des mineurs. Ainsi, plus de 113 000 enfants de moins de 18 ans ont subi le divorce de leurs parents, et jusqu’à 165 000 si l’on y ajoute les enfants devenus majeurs.
Le juge aux affaires familiales doit régler la question de la garde des enfants et des pensions alimentaires ; ce qui complique la séparation. Sans surprise, il y a donc davantage de procédures contentieuses que lors d’un divorce entre deux adultes seuls.
Le principe de résidence alternée, chez le père et la mère, est entré dans la loi en 2002. Dix ans après, il a été retenu dans 21 % des cas (et jusqu’à 30 % lors de divorces par consentement mutuel).
Une « pension alimentaire » – officiellement nommée « contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant (CEEE) » – est imposée par le juge dans deux tiers des divorces (68 %). Fixée à 170 euros par mois en moyenne, elle est versée par le père dans la quasi-totalité des cas (97 %).
6. Les divorces creusent les inégalités hommes-femmes
Le passage devant le juge sert notamment à évaluer les risques financiers liés à la séparation des couples. Malgré les prestations compensatoires versées entre époux, les divorces causent d’importantes pertes de revenus : chacun doit de nouveau assumer seul son logement et les charges, le transport, les enfants… Selon une étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), les séparations accentuent des inégalités de genre : les femmes perdre jusqu’à 19 % de leurs revenus, contre seulement 2,5 % pour les hommes.
Pour les femmes qui apportaient moins de ressources au ménage, parce qu’elles travaillaient à temps partiel par exemple, la perte de revenu peut atteindre 26,5 %.
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