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Le moustique tue 80 000 fois plus que le requin

Entretien. Le chercheur océanographique Robert Calcagno rappelle que ce grand poisson n'est responsable que de dix morts dans le monde par an.

Propos recueillis par 

Publié le 08 juillet 2013 à 15h58, modifié le 09 juillet 2013 à 18h20

Temps de Lecture 3 min.

Le moustique tue 80 000 fois plus que le requin selon l'Institut océanographique Fondation Albert-Ier-Prince de Monaco.

Robert Calcagno est directeur de l'Institut océanographique Fondation Albert-Ier-Prince-de-Monaco, organisme qui s'engage pour défendre les requins, trop souvent perçus comme de terribles prédateurs pour l'homme. Le scientifique vient de publier l'ouvrage Requins, au-delà du malentendu aux éditions du Rocher-Institut océanographique de Monaco. Entretien.

Pourquoi prendre position en faveur des requins ?

Nous nous efforçons de changer le regard du grand public, de lever un malentendu à leur propos. Ces grands prédateurs ne sont pas de grands méchants tapis au fond des océans. Ils sont responsables d'une dizaine de décès par an. Les moustiques, eux, en provoquent 80 000 fois plus. Ces chiffres sur les requins sont fiables : il existe aujourd'hui plusieurs banques de données dans le monde qui recensent chaque attaque sur les humains.

L'homme, en revanche, pêche des dizaines de millions de requins par an. Leurs populations ne peuvent pas s'adapter pas à une telle prédation, elles s'effondrent. De nombreuses espèces sont aujourd'hui au bord de l'extinction ou d'une disparition locale.

Nous organisons cette année une série de conférences grand public gratuites à leur sujet, à la Maison des océans, rue Saint-Jacques, à Paris. Et nous venons d'inaugurer une exposition au Musée océanographique de Monaco, qui va durer jusqu'en 2015. Les visiteurs ne viennent plus recueillir des informations qu'ils peuvent trouver ailleurs, ils souhaitent vivre une expérience, des émotions et c'est pourquoi nous leur montrons, par exemple, concrètement la vitesse d'un déplacement d'un requin-mako. Il y a de quoi rester abasourdi et comprendre qu'il est inutile de fuir en présence d'un requin : mieux vaut lui faire face. Nous proposons de finir la visite en plongeant la main dans un bassin qui abrite douze spécimens. C'est un moyen de nouer un autre contact…

N'y a-t-il pas tout de même une partie de la population que vous aurez du mal à convaincre ?

Le 10 juin, nous avons organisé une rencontre à Monaco de différents acteurs scientifiques, économiques et sportifs de La Réunion. Des ONG, des surfeurs, des représentants du tourisme – les requins constituent aussi un attrait, pour les plongeurs, notamment – ont réussi à échanger lors d'un débat constructif. Ils ont même signé ce jour-là un texte commun ! Tout le monde s'est accordé pour demander plus d'études scientifiques, mais sans attendre trop longtemps les conclusions. Il faut admettre une fois pour toutes que le surf est un sport à risque qui exige de se renseigner avant de le pratiquer, comme on le fait avant de se lancer dans une escalade ou dans du ski hors piste.

Pourquoi s'inquiéter de la rareté excessive des requins ? Quelles en sont les conséquences sur l'écosystème marin ?

Ils ont un rôle-clé dans l'écosystème. Ils se trouvent au sommet de réseaux trophiques complexes, d'où ils s'attaquent à des espèces qui deviennent trop nombreuses ou à des animaux affaiblis, malades, qui pourraient contaminer leurs congénères. Sur une partie de la côte Est des Etats-Unis, par exemple, les hommes ont tellement pêché de requins qu'ils les ont éliminés. Les populations de raies se sont alors développées, elles ont décimé les pétoncles.

Pensez-vous que les outils de protection internationaux ont échoué ?

Soyons justes : la prise de conscience progresse. L'Union européenne a interdit la pratique du "finning" – la découpe d'ailerons de requins –, et je suis d'ailleurs convaincu que la soupe aux ailerons finira par passer de mode auprès des jeunes Chinois. Plusieurs Etats, notamment dans le Pacifique, ont créé récemment des aires marines protégées, des sanctuaires pour abriter le prédateur. Et cinq espèces supplémentaires viennent d'être inscrites sur la liste de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, la Cites. Mais on est loin du compte : il faudrait instituer des quotas de pêche comme pour le thon rouge.

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